Sur la consommation de web par les « top décideurs »

Nous nous sommes intéressés pour un client aux pratiques de consommation du web par le top management des entreprises (pas les cadres mais bien les plus hauts niveaux décisionnaires).

La question n’est pas si simple car finalement on nous demande souvent soit de réfléchir large (comment toucher le plus de monde possible), soit de réfléchir très ciblé (je veux parler avec les leaders d’opinion dans un domaine donné)… Mais la question de savoir comment les « top » décideurs en entreprises consomment du web est à ma connaissance peu nourrie par des études, et pour ce public finalement assez particulier, il n’est pas du tout évident de dire que « ce qui compte pour eux, c’est le web ». Au contraire.

Je partage donc avec vous quelques-uns des éléments de réflexion (intuitufs et/ou analytiques), en espérant que la discussion puisse les compléter ou en apporter d’autres.

1. Les décideurs sont de gros consommateurs d’information. Ca c’est la bonne nouvelle. Mais leur consommation est essentiellement offline. Ils mangent de la revue de presse, des notes de synthèse, du journal papier… A la fois parce que l’information est une denrée stratégique et parce que leurs modes de travail le permettent (beaucoup de déplacements). Leur préférence va clairement à la presse papier (Monde, Figaro, Echos, Tribune, newsmags, Challenges…). Ils surfent peu par eux-mêmes (effet générationnel).

2. Pour autant, leur consommation de web n’est pas néante. Elle est surtout indirecte : les revues de presse (y compris papier) des entreprises incluent de plus en plus d’articles issus du web, et pas forcément juste de médias online mais aussi de blogs (blogs experts). Là nous sommes à la fois sur une intuition et des choses vérifiées (comment la revue de presse des grands groupes est constituée + les corpus de veille proposés par les prestataires de revue de presse). On voit d’ailleurs passer de temps en temps dans les statistiques de ce blog des clics en provenance de sociétés de pige ;-). L’adage pourrait devenir : « je suis pigé, donc je suis influent ».

De même, l’entourage de nos décideurs, qui rédige les notes etc., est lui bel et bien sur le web.

3. Les nombreux déplacements des top managers pourraient justifier une consommation importante d’information sur mobile, mais ce n’est sans doute pas encore un usage très répandu. D’abord parce que le web mobile n’explose finalement que depuis l’arrivée de l’iPhone, ensuite encore une fois à cause de l’effet générationnel. Un top manager qui ne surfe déjà pas des masses par lui-même va sans doute peu surfer sur son terminal mobile (tout le monde n’est pas aussi cool qu’Obama). Pourtant cet usage devrait se répandre de façon exponentielle (mobilité, décalage horaire = impossibilité d’accéder à son journal papier => rôle du surf et du mobile)

4. Sur l’effet générationnel justement, comment voit-on évoluer cela ? Très vite finalement, comme le montrent ces données issues d’une étude de McKinsey réalisée pour les Etats Généraux de la Presse :

EGP McKinsey

Où l’on voit donc à la fois que :

– le renouvellement des générations affaiblit la lecture de la presse quotidienne (de 66% de lecteurs chez les + de 65 à 30% chez les moins de 18)

– ET que les habitudes se perdent progressivement : l’effet de génération (c’est à dire : je conserve mes habitudes en vieillissant) est relatif, puisque par exemple ceux qui avaient entre 18 et 24 ans en 1999 étaient 42% à lire un quotidien une fois par semaine ; en 2007, ils ont 26 à 32 ans et ne sont plus que 34% à lire un quotidien…

Autrement dit, les choses vont vite et les top managers de demain sont sur le web aujourd’hui.

5. Quels lieux du web sont privilégiés par les décideurs ? Question compliquée car l’usage répandu de la consommation d’information sur le web, c’est Google, qui fait 50 à 80% du trafic des sites média et les encourage à jouer la réactivité et l’effet volume avant tout (voir la polémique autour des forçats de l’info…) et ne privilégie pas une info quali. Le fait que le modèle gratuit se soit imposé fait que la question du mediaplanning des sites online est assez floue (qui sont mes lecteurs ? ben euh… ceux qui tapent des mots-clé), l’internaute cherche du contenu avant de faire confiance à telle ou telle marque média, et la marque à laquelle il fait confiance c’est Google.

En gros, l’équation est : modèle publicitaire + gratuité = course à l’audience = effets volumes et réactivité = Google fait mon trafic = ma base de lecteurs identifiés et fidèles est minoritaire = brouillage des profils de lectorats entre les différents médias.

Sauf que nos top managers, eux, restent beaucoup plus que l’ensemble des internautes dans cette logique de confiance vis-à-vis de marques média fortes. Sur le principe, les sites payants semblent beaucoup plus à même d’être la réponse à la question posée ici (quels sont les lieux du web privilégiés par les décideurs), mais le modèle payant ou même hybride (Le Monde, Les Echos, Le Figaro, La Tribune encore eux) est tellement minoritaire qu’il reste difficile de répondre à cette question. Il y a peut-être une carte à jouer pour des sites d’info économique très quali et payants destinés à ce public de top décideurs. L’avenir le dira.

3 réponses à “Sur la consommation de web par les « top décideurs »

  1. Intéressants effets générationnels.
    En fait, ce qui est le plus étonnant encore, c’est le surf mobile « intelligent » qui ne perce pas. C’est à dire sans vraiment utiliser le navigateur. Par exemple un bon aggrégateur de flux, avec des flux choisis par habitude, et des flux paramétrés avec mots-clés de recherche : un concurrent, un marché, une technologie… Pour des décideurs mobiles c’est plus pertinent.
    (PS : c’est quoi, ce titre…;-) )

  2. François Guillot

    Sur le mobile je crois avoir vu une étude qui tendait à montrer que l’internaute retrouvait de la fidélité vis-à-vis de ses médias préférés : sur mobile, je retourne voir mes sites favoris et je tourne entre un nombre réduits de sites que je consulte régulièrement.

    Pour le titre : mais oui je suis d’accord, je ne sais plus faire un titre, je m’en suis rendu compte aussi. J’ai perdu ça pendant ma pause de deux mois et maintenant je sèche et ça donne des « sur ceci », « sur machin », « sur truc » tout pourris. Toutes suggestions bienvenues.

  3. Un complément utile sur les usages web par le top management, notamment dans le secteur technologique… http://is.gd/1dcUZ