Archives mensuelles : Mai 2009

Sur la nouvelle posture de TF1

Il y a quelques semaines, Emmanuel faisait l’hypothèse que TF1 était en train de prendre de l’avance sur Internet à travers une stratégie relationnelle qui prenait notamment la forme du blog de Jean-Marc Pillas, son médiateur.

Emmanuel disait alors : « La chaîne semble s’être lancée dans une vaste opération séduction – une opération de marketing relationnel, de dialogue avec ses téléspectateurs ». Emmanuel semble avoir vu d’autant plus juste que plusieurs éléments récents viennent enfoncer son clou :

– d’abord, la nouvelle version de TF1.fr,  mise en ligne il y a environ un mois. Un sacré boulot et une petite révolution en soi, notamment en termes de posture. A la fois parce qu’on y trouve quelque chose qui ressemble à une plate-forme de feedback (TF1 & vous), mais aussi parce que la grille des programme TV va jusqu’à donner les programmes des autres chaînes.

Certes le menu qui s’affiche par défaut est celui de la grille TF1 seule et il faut un clic supplémentaire pour voir les programmes de la TNT, mais quand on se met dans la peau de TF1, ce n’est pas une fonctionnalité anodine du tout. Elle semble au contraire révélatrice d’une philosophie de connivence et de service que l’on n’attendait pas vraiment de la part de TF1.

– ensuite, la campagne de publicité corporate lancée hier et que voici :

Encore une fois une posture inattendue de la part de TF1 et qui semble définitivement incarner une nouvelle philosophie. Cette campagne TV n’est-elle finalement pas une des meilleures démonstrations pour les webologues dont nous sommes, sur le monde vertical qui devient horizontal, le bottom-up, l’écoute des publics, l’évolution « du je des entreprises au nous de la société » et tout ce que l’on peut raconter pour décrire l’impact du web dans la communication ?

Pour décrire cet impact, c’est anecdotique, mais je me souviens avoir été très marqué quand ado, alors que je regardais le foot sur Canal + : les commentateurs de Canal indiquaient que le prochain match serait sur TF1 : ils parlaient aux fans de foot, pas aux téléspectateurs de Canal +. Alors que TF1 n’indiquait pas (toujours pas d’ailleurs, que je sache), à l’inverse, que tel match serait diffusé sur Canal… Bref, ce que cela révélait, c’est que Canal + représentait l’esprit communautaire et de service avant l’heure, et cet esprit communautaire et de service qui fonctionne si bien sur le web est aussi en train d’imprégner la culture des entreprises. Non pas que le web ait inventé cette culture, mais il l’accélère sans doute, voire la révèle.

On a déjà eu l’occasion de le dire ici ou là, mais un des impacts les plus significatifs du web est donc l’impact culturel : ou comment les valeurs de transparence, authenticité, sincérité, esprit de communauté et logique de service, parce qu’elles fonctionnent en ligne et révèlent les attentes des publics, se répandent au-delà du web.

Etude TNS sur les sources de confiance : en gros, c’est bien compliqué cette affaire

Malheureux que nous sommes, nous n’avions pas encore pris le temps de commenter les résultats de la dernière enquête TNS sur les sources de confiance (vue il y a une quinzaine de jours sur le blog eMarketer par Emmanuel).

D’abord, les chiffres :

103387

Les résultats sont très intéressants car finalement on n’a pas eu tant que ça entre les mains des études de ce type avec des résultats portant spécifiquement sur la France. En gros, ce que l’on est sûr de savoir, c’est que parmi toutes les formes d’influence, c’est avant tout la recommandation personnalisée qui prime, c’est à dire l’influence du quotidien qui se fait au sein de la famille, des groupes d’amis ou de pair à pair.

Les données issues de cette étude de TNS ne remettent pas cette forme d’influence en question, mais avec 31% pour « recommendations by friends », on ne peut pas dire que le score soit très élevé.

Au contraire, concernant la colonne France, ce qui marque c’est finalement à la fois :

– le niveau relativement faible de confiance accordée dans les différentes sources, quelles qu’elles soient (jamais plus de 35%, score obtenu par les « industry magazines » que cela consolera peut-être un tout petit peu de leurs chiffres de vente).

– le tassement des chiffres concernant l’ensemble de ces sources : difficile de dégager une véritable hiréarchie de l’influence.

Bien sûr, on n’est « que » sur un échantillon d’internautes, soit pour la France entre 60% et les 2/3 de la population. Exit les non-consommateurs du web. Mais il est quand même assez troublant de voir que les « online news », les « newspapers » et… Wikipédia obtiennent exactement le même score (28%). Malgré tout ce que l’on peut dire ou lire sur Wikipédia (voir l’édifiante affaire de la page Maurice Jarre).

La France n’est presque bizarrement pas le pays étudié où l’information des entreprises est la moins considérée. Les « company websites » obtiennent un score de 21%, soit plus qu’en Allemagne ou en Espagne. Et le score des brochures est le plus élevé (ou plus exactement, le moins bas) de tous les pays européens (17%).

Que retenir de cette étude ? Finalement, là où elle me semble bel et bien confirmer les analyses actuelles, c’est que les système d’influence sont de plus en plus complexes emmêlés et difficiles à décrypter…

PS : rien à voir mais pendant que j’y suis : PUB pour le nouveau blog collectif de mes collègues à qui on souhaite longue vie (ou survie) dans la blogosphère.

Rachida Dati et le communiqué de presse le plus court de l’histoire

En bloguant aux côtés de François, je suis devenu sensible à une prose bien particulière méconnue du grand public mais que les journalistes connaissent particulièrement bien – la prose du communiqué de presse. Il y aurait beaucoup de choses à dire sur le sujet. Mais, aujourd’hui, on se contentera d‘un des derniers communiqués de Rachida Dati. La presse s’en est faite l’écho mais en vrai, en image c’est encore mieux. Cela se passe de commentaires. J’ai juste une pensée pour les attachées de presse, le webmaster, etc. enfin tout ceux par qui est passé ce bout de phrase ridicule.

En tout cas, on peut désormais trouver une nouvelle utilité aux communiqués de presse. Ils peuvent être de bons indices de l’état de délitement d’une institution ou d’une fonction (on pourrait faire un parallèle avec le militaire qui ne marcherait pas en rythme, qui serait mal rasé ou avec un uniforme mal repassé). Commercial, institutionnel ou politique le communiqué de presse doit avoir une certaine tenue. Le communiqué de presse, même s’il délivre une info, fait dans l’apparence et dans l’apparat. Le communiqué de presse est un outil de présentation de soi, de préservation de la face, d’une identité pour faire un clin d’oeil à Erving Goffman. Et aux journalistes de lire plus ou moins entre les lignes.

Ne sommes-nous pas devant le communiqué de presse le plus court de l’histoire, le plus lapidaire ? Y aurait matière à concours pour les journalistes 😉
imagemj

À lire également le constat désespéré de maître Eolas et le coup de gueule d’Enikao qui parle d’une sorte d’abus de bien social (bon là c’est un abus de langage 😉

Quand l’OCDE oublie le web… Sommeil, Bouffe et Télé sont-ils alors vraiment les trois piliers de la société française ?

L’OCDE publie ces jours-ci son Panorama de la société 2009 (via press-ses). Une longue compilation d’indicateurs clés dans de nombreux domaines. J’ai porté mon attention sur le chapitre spécial de cette nouvelle édition qui porte sur les temps de loisirs dans les pays membres de l’OCDE.

Avant de commencer, une remarque de forme. Il est particulièrement regrettable qu’une telle institution n’offre pas une meilleure diffusion de ces indicateurs. Aujourd’hui, avec les possibilités techniques offertes par Internet, il est dommage de voir que l’OCDE ne propose pas une navigation facile et « vulgarisée » dans ses indicateurs. Vraiment dommage !

Ceci dit, je retiendrais trois résultats de cette édition :

  • le premier concerne le sommeil des Français. Selon les auteurs du panorama, les Français dorment plus que les autres population de l’OCDE. Notre temps de sommeil moyen par jour est de plus de 520 minutes faisant de nous les champions de l’OCDE. Un résultat intéressant mais en contradiction avec les derniers chiffres publiés sur la question en mars dernier lors de la journée nationale du sommeil. On y apprenait que les Français, entre 25 et 45 ans,  dormaient environ entre 7 heures en semaine et 7h50 le week-end. On est loin des  8 heures et 50 minutes affichées par l’OCDE… Qui dit vrai ? Je ne sais pas, d’autant plus que l’OCDE ne donne pas de détail sur les populations à partir desquelles il travaille…
  • sommeil2nd enseignement : la pratique du repas. Là aussi, et c’est un élément bien connu désormais, les Français passent le plus de temps à boire et à manger. Nous passons 135 minutes par jour en moyenne devant un repas. « Chaque jour, les Français consacrent presque deux fois plus de temps à leurs repas que les Mexicains, les Canadiens et les Américains » OCDE dixit. Les chiffres de l’OCDE me semblent fiables. Ils sont très proches des résultats des enquêtes Emplois du temps de l’INSEE à quelques minutes près.repas
  • Dernier enseignement : la télévision resterait le loisir préféré des populations de l’OCDE… Loin devant, très loin devant « visiter ou recevoir des amis », « se rendre à des manifestations culturelles » ou encore le sport. De quoi décourager les défenseurs du web…
    Oui mais voilà, petit souci : d’abord les chiffres datent de 2006 et dans certains pays les choses évoluent. Donc parler de la société en 2009 avec des chiffres publiés en 2006 (et donc récoltés peut-être même en 2005) faut faire attention… Surtout que, comme vous le verrez dans le graphique la catégorie qui vient juste après voir avant la télévision est « Autres activités de loisirs ». La catégorie fourre-tout est donc en première ou deuxième position. Le genre de situation impensable. Il en va ainsi de la France : la télé est à 35 % tandis que la catégorie autre est à 44%
    N’importe quel étudiant se ferait bouler pour présenter une catégorisation où la catégorie autre est majoritaire ou presque. Cela signifie donc qu’aujourd’hui, l’OCDE n’est pas en mesure de décrire convenablement les loisirs des ses populations (en même temps ce n’est pas sa priorité j’en conviens). Espérons que la prochaine édition prendra en compte Internet…

TeleAvez-vous remarquez le petit détail ? L’OCDE publie le tableau avec le titre suivant : « la télévision est l’activité de loisirs préférée ». Or la colonne de droite regroupe TV et Radio à la maison. Donc en fait, les chiffres que nous fournie l’OCDE ne permettent pas de démontrer que la télé est l’activité de loisirs préférée.

Pour terminer, réponse à la question en titre : La bouffe est toujours un piliers de la société française. Quand au sommeil j’ai des doutes, de même pour la télé (les raisons sont différentes : pour le sommeil, les données OCDE ne recoupent pas d’autres enquêtes nationales; pour la télé, c’est la catégorisation des chercheurs qui pose problème – dommage que l’on ait pas accès aux données brutes)… On attend enfin avec impatience que le web devienne « visible » pour l’OCDE.

Une autre vidéo que celle de Susan Boyle

Le feu croisé Bruant / Narvic / Gunthert à propos de Susan Boyle sur le billet précédent m’a donné envie de faire un petit tour sur le viral vidéo chart, où je suis tombé sur un nouveau film de T-mobile :

« Nouveau » car bien sûr T-mobile s’était fait remarquer avec un premier happening (je ne dis pas flash mob, Bruant m’engueule quand je dis que c’est un flash mob) avec sa chorégraphie plutôt inattendue (bon, allez, reconnaissons-le et disons « assez géniale ») dans la station de Liverpool Street.

En parallèle, d’autres vidéos du type « happening public » commencent à pulluler sur Youtube… et pas forcément toutes aussi emballantes. Alors on peut se demander : le futur du marketing viral est-il dans la rue ? Ou plus précisément, dans la rue et en TV puisque les films de T-Mobile ont également été diffusés sur le petit écran ?

Il y a un côté assez fascinant dans ces grands rassemblements populaires, qui flirte avec le soutien aux grandes causes façon We Are The World. Déjà un concert c’est beau, alors 13 000 personnes qui chantent Hey Jude à Trafalgar Square…

Sauf que, sauf que, c’est une pub. Une pub pour un opérateur mobile, et ça « ça gâche un peu le goût de mon plaisir », comme disait Michel Drucker dans l’original de la chanson des Enfoirés. (Dingue, je viens de citer les Enfoirés sur le blog, et pourtant je vous promets, je n’ai pas perdu de pari stupide).

Bref, le problème, encore et toujours, est que pour surprendre il faut toujours faire mieux, et le genre « happening » va tendre à se banaliser. Finalement, le marketing viral, malgré ce qu’il peut produire de plus créatif, peut-il être autre chose qu’un genre marginal ?

Bon, voilà tout pour ce soir.

PS : notez le détail délicieux dans la description de la vidéo par T-Mobile sur Youtube :

« The exclusive 4 minute extended version of the moment 13,500 people spontaneously sang Hey Jude together in Trafalgar Square. » Cherchez le mot de trop.

Susan Boyle nue ou presque : éléments pour décrypter la vidéo de l’année

Edit : ce billet n’est intéressant qu’à partir des commentaires… Merci à Narvic et André  pour leur patience et leurs développements. Et au fait, Susan Boyle n’est pas nue sur ce blog

Vous avez aimé ou détesté Susan Boyle ? Vous y êtes indifférents ? Bien… Une chose est sûre, la vidéo continue à faire grand bruit. Grand bruit dans la blogosphère avec commentaires et analyses à la clé et surtout grand bruit sur les plates-formes vidéos puisque « Susan Boyle »  est devenue une des vidéos les  plus vues de l’histoire d’Internet voire la plus vue.

Grand bruit dans la blogosphère : une sélection de quelques liens intelligents

Que dire de « Susan Boyle » ? Que nous apprend cette vidéo ? J’ai choisi trois liens qui explorent de manières très différentes ce buzz :

  • Narvic insiste sur l’hybridation entre télé et web. Preuve que la télévision n’a pas dit son dernier mot ? Narvic est trop pressé de tuer les prophètes du web 2.0 (qu’il semble découvrir depuis quelques semaines) et sa démonstration, stimulante, prend un peu vite la partie pour le tout. Un exemple ne fait pas une généralité.
  • André Gunthert décrypte les motifs visuels de cette vidéo qui l’ancrent dans la culture populaire – imagerie détestable à son avis. La critique du chercheur, pertinente, perd hélas de vue les « qualités » de la séquence – tant et si bien qu’elle n’explique pas grand chose de ce succès (si « Susan Boyle » n’était que de la télé pourquoi buzze-t-elle autant ?).
  • Simon Dumenco d’Advertising Age, dans un piètre billet sur les leçons à tirer en matière de marketing, termine néanmoins par une fulgurance : combien de temps  Google pourra-t-il se permettre de laisser se diffuser un tel succès ? Car Susan Boyle, la vidéo, coûte cher en matière de bande passante… Et oui, un jour il faudra bien répondre à ces questions…

Grand bruit sur les plates-formes :

La société Visible Measures a publié sur son blog plusieurs données quanti de visionnages :

  • le 17 avril, la vidéo était déjà un carton historique, comparaison à l’appui :

susan-boyle-viral-video-resized-600

  • Plus récemment, le 27 avril, la vidéo continuait son audience folle, avec plus de 170 millions de visionnages :

susan-boyle-surpasses-170-million-viral-video-views-resized-600

Tout est réuni pour faire de ce buzz, un cas d’école…